Construction sur sol d'autrui : risques et précautions juridiques

  • Agriculture
Publié le 24 avril 2025
Construction sur sol d'autrui : bâtiment agricole en cours d'assemblage avec structure métallique sur terrain rural

En milieu rural, il est fréquent que des bâtiments d’exploitation soient édifiés sur un sol n’appartenant pas au bâtisseur. Les situations susceptibles de se rencontrer sont multiples. L’un des cas les plus rencontrés est celui de cet exploitant agricole qui fait édifier un bâtiment professionnel sur une emprise foncière propriété de ses parents ou encore sur une parcelle appartenant à son bailleur. Il n’est pas moins rare qu’une société agricole fasse bâtir sur un sol mis à disposition par l’un des associés, voire même sur un terrain pris à bail par un associé auprès d’un tiers et mis à disposition de la société.

Risques juridiques liés aux constructions sur sol d’autrui

Ces édifications sur terrain d’autrui peuvent être source de nombreux désagréments ou de désillusions. Les difficultés apparaissent parfois plusieurs années après l’achèvement des travaux, à l’occasion d’un différend familial (parents, frères et sœurs au décès), ou encore lors d’un conflit entre associés de société.

Statut juridique de l’immeuble et propriété du sol

En cas de litige, il convient d’examiner le statut juridique des immeubles construits sans lien avec le sol, ainsi que les rapports juridiques entre le superficiaire (propriétaire du bâtiment) et le tréfoncier (propriétaire du sol).

En l’absence de convention particulière ou de bail, l’article 552 du Code civil rappelle que le propriétaire du sol est aussi propriétaire de tout ce qui s’y trouve.

La question de la propriété est donc tranchée.

L’article 555 ajoute que le propriétaire foncier peut, à son choix, conserver l’immeuble bâti par un tiers moyennant indemnisation, ou en exiger la destruction à ses frais.

Cas du fermier bâtisseur : une protection encadrée

Lorsque l’édification est faite sur un terrain pris à bail rural, le fermier bâtisseur est protégé par le statut du fermage, à condition d’avoir obtenu l’accord préalable du propriétaire et que l’immeuble conserve une valeur d’utilité.

Le fermier reste propriétaire de l’édifice durant toute la durée du bail rural. En fin de bail, il peut bénéficier d’une indemnité d’amélioration, selon les articles 411-69 et 411-71 du Code rural.

Construction par une société agricole sur le terrain d’un associé

La situation est plus complexe lorsque l’édifice est construit par une société agricole sur le terrain d’un associé. Les conventions de mise à disposition ne relèvent pas du statut du fermage, comme le précise l’article 411-2 du Code rural.

Il est essentiel de prévoir, dans la convention, le sort de l’immeuble à la fin de la mise à disposition, notamment en ce qui concerne les clauses d’indemnisation si le bâtiment est conservé.

Complexité accrue : terrain loué par un associé à un tiers

La construction sur un terrain loué à un tiers par un associé de la société pose encore plus de difficultés. Sur le plan juridique, il faut que le fermier ait obtenu une autorisation de construire du bailleur, même si la société finance la construction.

En fin de bail, seule la relation juridique entre fermier et bailleur est reconnue. L’indemnité éventuelle sera donc due au fermier, pas à la société.

D’où l’importance de prévoir dans la convention de mise à disposition les modalités de reversement à la société des indemnités perçues par le fermier, soit en fin de bail, soit en cas de retrait.

Mieux vaut prévenir que bâtir sur le sol d’autrui

Ces développements montrent que construire sur sol d’autrui est loin d’être un acte anodin. Un examen juridique préalable est indispensable avant tout projet de construction. Lorsque cela est possible, l’acquisition du terrain avant l’édification reste la meilleure solution, surtout pour les investissements lourds.

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