Sociétés civiles agricoles : légalisation des activités commerciales

Face à l’évolution du monde agricole, de nombreux exploitants développent désormais des activités commerciales complémentaires à leur activité de production. Il est devenu courant, par exemple, que ces derniers vendent des produits ne provenant pas exclusivement de leur propre exploitation, ou proposent des services en lien avec la ruralité. Le site même de l’exploitation se transforme parfois en lieu d’accueil touristique ou pédagogique, comme dans le cas des fermes auberges ou d’activités de loisirs ruraux.
Une réalité économique déjà intégrée sur le plan fiscal
Le législateur avait déjà anticipé cette réalité économique sous l’angle fiscal : l’article 75 du Code général des impôts permet depuis plusieurs années, sous certaines conditions, de maintenir ces revenus accessoires dans le champ des bénéfices agricoles, évitant ainsi selon les cas leur requalification en bénéfices industriels et commerciaux ou leur soumission à l’impôt sur les sociétés pour les personnes morales.
Ce régime fiscal de faveur s’applique tant que deux seuils ne sont pas franchis :
- 100 000 € de recettes issues d’activités commerciales
- ou 50 % des recettes agricoles
Un vide juridique pour les sociétés civiles agricoles
Mais cette souplesse n’était que fiscale, laissant subsister un vide juridique important, notamment pour les sociétés civiles agricoles (EARL, GAEC, SCEA).
Ces structures, dont l’objet est strictement agricole, se retrouvaient en insécurité juridique lorsqu’elles exerçaient des activités qualifiées de commerciales.
Des incertitudes demeuraient, notamment sur la validité de leur objet social et la prise en charge assurantielle de ces nouvelles activités.
Loi du 24 mars 2025 : une avancée juridique majeure
Ce flou est désormais levé grâce à la loi du 24 mars 2025, dite « loi sur la souveraineté alimentaire« , qui reconnaît expressément la possibilité pour les sociétés civiles agricoles d’exercer des activités commerciales.
Cette avancée majeure vient sécuriser juridiquement une pratique déjà largement répandue.
Cependant, cette ouverture reste encadrée :
- Les activités commerciales doivent être accessoires et directement liées à l’activité agricole ;
- Les recettes issues de ces activités ne doivent pas dépasser : 20 000 € par an ou 40 % des recettes agricoles annuelles ;
- Pour les GAEC, ce seuil de 20 000 € est multiplié par le nombre d’associés, dans la limite de 10 associés.
Une harmonisation juridique et fiscale encore imparfaite
Si cette sécurisation juridique est bienvenue, on peut toutefois regretter l’absence d’harmonisation entre les seuils fiscaux et juridiques, source de confusion.
Ce décalage illustre, une fois encore, la complexité du droit français, où la reconnaissance juridique ne va pas toujours de pair avec les tolérances fiscales.
Dans la lignée de cette évolution juridique, les sociétés civiles agricoles se livrant à des activités commerciales accessoires devront mettre à jour leurs statuts en cohérence.
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